Parsifal

Marek Janowski
Rundfunkchor Berlin
Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
Date/Location
3 December 2006
Grimaldi Forum Monaco
Recording Type
  live   studio
  live compilation   live and studio
Cast
Amfortas Konrad Jarnot
Titurel Bjarni Thor Kristinsson
Gurnemanz Kristinn Sigmundsson
Parsifal Robert Dean Smith
Klingsor Eike Wilm Schulte
Kundry Petra Lang
Gralsritter Ferdinand Seiler
Hans Griepentrog
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Parsifal sur le rocher

Le chef allemand Marek Janowski, pour fêter les cent cinquante ans de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, a programmé, en version de concert, l’ultime opéra de Wagner, Parsifal, dans une interprétation de haute tenue plus ancrée dans le drame que dans le sentiment religieux, servie de surcroît par une brillante distribution.

La ville de Monte-Carlo constitue en soi un décor de théâtre, à l’image de son Opéra qui vit les beaux jours des Ballets russes et se présente comme une réplique en modèle réduit du Palais Garnier. Pourtant, pour présenter cette version de concert de Parsifal en matinée, le chef d’orchestre Marek Janowski, qui a occupé pendant cinq ans les fonctions de directeur musical et artistique d’un orchestre philharmonique de la principauté qu’il a profondément restructuré, a choisi le cadre à la fois moderne et kitsch du Grimaldi Forum, à l’acoustique plus aléatoire qu’il connaît bien.

Plus que tout autre des opéras de Wagner, Parsifal, testament musical conçu par le maître de Bayreuth comme un exemple d’art total ? l’oeuvre porte en sous-titre « festival scénique sacré » ? peut revêtir l’aspect d’un oratorio tant l’action, intériorisée, met en valeur les choeurs qui ont une part déterminante dans le déroulement dramatique, par ailleurs réduit à la portion congrue. En effet, le héros triomphant traverse quelques avatars ? au sens bouddhique du terme ? pour accéder, au terme des trois actes de l’opéra, au Graal, et rompre la malédiction qui pèse sur Amfortas et les Chevaliers.

On peut faire confiance à Janowski qui son connaît son Wagner comme personne et qui l’a souvent prouvé quand il présidait aux destinées de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Il sait équilibrer les différents paramètres par sa direction allante, claire, soucieuse de doser les voix, l’orchestre et la masse chorale, en privilégiant l’efficacité immédiate à la démesure transcendantale ? celle héritée de Knappertsbusch.

Sans jamais se perdre en conjectures, le chef allemand réalise ? tel un alchimiste pesant les ingrédients susceptibles de donner accès à la pierre philosophale ? une synthèse de la profondeur de l’orchestre allemand et d’un impressionnisme musical allégé. Conforté par l’assise que procurent les choeurs tout à fait exceptionnels de la Radio de Berlin avec lesquels il a souvent l’occasion de travailler dans la capitale allemande, il procure aux chanteurs un écrin dans lequel ils peuvent se lover.

Un plateau somptueux

Le ténor américain Robert Dean Smith, familier du festival de Bayreuth, a les moyens de Parsifal, une aisance et une souplesse qui lui permettent de passer sans encombres les différents états du rôle-titre. L’Islandais Kristinn Sigmundsson en Gurnemanz est une basse tout à fait sonore et au timbre chaud qui rend crédible un emploi qui demande endurance et sens narratif. Son compatriote Bjarni Thor Kristinsson est un Titurel sombre dont les injonctions à son fils Amfortas ? le baryton Konrad Jarnot ? n’appellent aucun déni, tel le Commandeur face à Don Giovanni.

Très impressionnante en Kundry, Petra Lang, à la fois sauvage (au I), sensuelle (au II), humaine (au III), aux possibilités vocales stupéfiantes, déchire par ses cris de douleur et son engagement physique, face à la malédiction que lui impose le magicien Klingsor campé avec solidité et force par Eike Wilm Schulte. L’homogénéité de la distribution ? des Filles-Fleurs en verve, des Écuyers bien campés ? contribue au succès de ce Parsifal qui parvient à faire oublier parfois le statisme et les divines longueurs qui parsèment ces quatre heures sublimes de musique dont on ne sort jamais indemne.

Michel LE NAOUR | Forum Grimaldi, Monte-Carlo Le 03/12/2006

ClassiqueNews.com

Après la Deuxième symphonie de Gustav Mahler, voici le deuxième temps fort de la saison des 150 ans du Philharmonique de Monte-Carlo. Un nouveau concert qui permettait d’écouter le niveau exceptionnel atteint par le Philharmonique monégasque. Marek Janowski retrouve les musiciens de l’Orchestre dans l’ultime opéra de Richard Wagner. Pourquoi Parsifal ? Parce que la partition eut sa première en dehors des murs de Bayreuth (1882), en 1913 à Monte-Carlo. Parce que l’oeuvre est l’aboutissement spirituel de la pensée musicale du compositeur. Autant dire que les interprètes conduits par le maestro se sont montrés à la hauteur de l’oeuvre.

Janowski manifestement inspiré, conduit l’intensité à son paroxysme se souvenant en son déroulement premier de la lenteur d’un Furtwängler. D’emblée, le chef a ce don de ne pas simplement interpréter une partition mais de la commenter. Comment ne pas céder au pouvoir de la musique, superbement gérée, accomplie avec cohérence et finesse? Imaginons ce qu’auraient pu être les critiques des oreilles en mal d’exigence critique : Des défauts ? Toujours l’acoustique écrasant les médium de la salle, met en difficulté les solistes, toujours le même problème. Qui est placé ici, aura trouvé que Robert-Dean Smith n’avait pas la stature wagnérienne pour Parsifal ; qui est assis là, aura trouvé que Konrad Jarnot, baryton clair, était un peu faible dans son interprétaiton d’Amfortas. Mais pour avoir entendu Villazon et Alagna dans cette même salle, pour avoir écouté les trois actes de Parsifal en trois endroits différents, votre témoin assure que Konrad Jarnot est brave et vigoureux, Robert-Dean Smith exceptionnel et magnifique.

  Autres critiques ? Même problème pour le Rundfunkchor de Berlin dans la distinction des barytons et des ténors au timbre proche, la stéréophonie héroïque de certains airs masculins, tombe à plat encore à cause de l’acoustique et aussi de la disposition de la version de concert. Reprocherait-on qu’on y préfèrerait de vrais choeurs d’opéra ? On reconnaîtra que la puissance et la violence de certaines émotions ne peuvent être rendues que par une formation plus lyrique, mais quel choeur d’opéra pourrait fournir des pianissimi aussi merveilleux et appropriés au thème du Graal ? Quel choeur d’opéra peut prétendre à cette précision d’horloge mécanique?

De son côté, Petra Lang en Kundry, est une voix géante et splendide qui rappelle les interprètes de Karl Boehm, avec un physique de Marlène Dietrich. L’opulence du timbre envoûte le public, il est lui-même, soumis aux artifices de la vénéneuse séductrice, prêt à succomber aux maléfices de Klingsor.

Et laissons ceux qui disent que les cloches avaient une sonorité plus “puccinienne” que celles de Bayreuth, dernier refuge de la critique, et louons le choix et l’effet des filles fleurs, aux timbres parallèles d’un côté et de l’autre de la scène, le premier registre, puissant, le second frais avec le timbre de l’innocence (en particulier Claudia Galli), le troisième, chaleureux. Mais on peut encore louer le choix de la basse vibrante et profonde Bjarni Thor Kristinsson pour un Titurel souverain, de Eike Wilm Schulte pour un Klingsor ferme et d’une prosodie maîtresse, et d’un Gurnemanz, Kristunn Sigmundsson, chargé d’émotion

Musicalement, on peut reprocher à Wagner qu’il ait favorisé la puissance du flux infini dans Parsifal, au détriment parfois de la richesse thématique et de sa force telle qu’il les synthétisa dans Tristan und Isolde. On peut regretter, surtout, le galbe naturel des thèmes des opéras antérieurs. On peut être agacé par sa vision philosophique du monde, certes prenante, mais que la transcription dans le texte fait paraître lente et fastidieuse : elle n’a pas le charme de l’inconscient qui abonde et s’écoule sous la plume d’un Maeterlinck.

On peut se dire qu’il faut un temps de maturation dans la vie de chaque auditeur pour comprendre ce que la vieillesse apporte de simplification, de décantation et de maîtrise (comme pour le Falstaff de Verdi). On se dit qu’il faudrait être musicologue pour admirer tous les présages de Strauss et de Schoenberg dans la partition wagnérienne. Mais, quand, sous la baguette de Janowski, dans le tableau du Graal à la fin du premier acte, le choeur d’hommes s’empare du fameux thème, l’élève jusqu’à ce que tous les instruments et les choeur de coulisse le hissent aux cimes des fréquences sonores, c’est le public tout entier qui pleure.

Cédric Costantino | 13.12.2006

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Premiere
Technical Specifications
192 kbit/s CBR, 44.1 kHz, 318 MByte (MP3)
Remarks
Broadcast of a concert performance