Parsifal

Kazushi Ono
Chœurs et Orchestre de l’Opéra de Lyon
Date/Location
17 March 2012
Opéra Lyon
Recording Type
  live   studio
  live compilation   live and studio
Cast
Amfortas Gerd Grochowski
Titurel Kurt Gysen
Gurnemanz Georg Zeppenfeld
Parsifal Nikolaï Schukoff
Klingsor Alexandro Marco-Buhrmester
Kundry Elena Zhidkova
Gralsritter Daniel Kluge
Lukas Schmid
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Reviews
forumopera.com

Tout commence un peu vite, comme si l’Opéra national de Lyon voulait rattraper ces trente-cinq années qui nous séparent de la dernière représentation intégrale de Parsifal donnée dans la capitale des Gaules. Les premières mesures du Prélude résonnent alors que le silence s’est à peine installé dans la salle, et le tempo adopté n’est pas vraiment celui de ce moment de recueillement absolu qu’avait imaginé Wagner. À cette impression initiale de hâte s’ajoute une gêne causée par la lumière qui reste un moment allumée avant de s’estomper peu à peu. On comprend vite qu’il s’agit là d’une astuce liée au décor : un rideau-miroir, renvoyant au public sa propre image et celle de la salle, devient progressivement translucide au fur et à mesure que s’éteignent les projecteurs, donnant l’illusion que les chanteurs, d’abord assis, puis se relevant peu à peu, sont les spectateurs eux-mêmes. Le procédé est efficace : en nous libérant ainsi symboliquement de nos corps, François Girard permet à la musique de nous placer en état d’apesanteur. La scène, coupée en deux, présente côté cour le monde des hommes unis dans leur méditation, leur désolation et leur adoration du Graal, tandis que les femmes, masquées, de dos, sont plongées côté jardin dans l’immobilité et l’obscurité : tout au long du premier acte, le dépouillement extrême du plateau, son partage en noir et blanc sont plutôt caricaturaux. La présence de chaises en plastique noir renforce la laideur de l’ensemble, que viennent heureusement nuancer les projections qui font de l’immense toile tendue au fond de la scène le lieu de l’écoulement incessant du temps et de la mobilité ininterrompue de l’œuvre (très beau travail du vidéographe Peter Flaherty).

À l’inverse, le deuxième acte offre une imagerie raffinée : la caverne dans laquelle se trouvent les filles-fleurs, créatures nées du sol et du sang qui recouvre la scène, chacune fichée en terre comme les lances qui se trouvent devant elles, présente d’immenses parois de roche noire et oppressante, percées d’une seule fente au fond de la scène. Aux fastes des lumières s’opposeront bientôt les teintes rouges et foncées du sang qui recouvre progressivement les robes blanches des filles-fleurs après avoir envahi la couche où Kundry a donné à Parsifal le baiser qui l’instruit. Moment fort de l’œuvre, spectaculairement mis en scène et musicalement poignant – le troisième acte présentant quant à lui un paysage de désolation que, curieusement, ne vient éclairer nulle image printanière d’un enchantement du vendredi saint. Parsifal est bien seul dans cette célébration de la rédemption. Certains pourront regretter que les effets visuels distraient en partie de la perception de la musique, même si celle-ci fait son chemin dans l’inconscient des auditeurs/spectateurs. On doit à la qualité de l’interprétation, servie impeccablement par le travail d’une finesse exemplaire des chœurs et de la Maîtrise de l’Opéra de Lyon, tant dans l’acte I qu’à la fin de l’acte III, le sentiment d’une élévation constante : l’homogénéité de l’orchestre et la finesse des nuances s’ajoutent à l’extrême précision avec laquelle se détachent les thèmes principaux, sur un fond sonore très uni. Le IIIe acte, dès le Prélude, confirme la maîtrise souveraine de Kazuchi Ono – qui se prépare depuis plusieurs années à cette représentation de Parsifal – et le talent des musiciens de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon. Cette progression continue dans l’exécution musicale est d’ailleurs en lien avec la prestation de Gurnemanz. La très belle voix de basse de Georg Zeppenfeld, toute en nuances dans le premier acte, se révèle plus majestueuse encore dans le troisième acte, où l’ampleur de la voix surprend chez le personnage, devenu un vieillard selon les indications du livret, mais qui avec Parsifal et la lance sacrée retrouve l’espoir et la vigueur. Le baryton-basse Gerd Grochowski fait un très honorable Amfortas, au jeu scénique certes inutilement appuyé mais dont la puissance vocale est capable de faire entendre de manière convaincante la déchirure du roi pécheur. Le mezzo-soprano Elena Zhidkova est une Kundry séduisante d’emblée, anticipant en quelque sorte dès l’acte I le rôle qui sera le sien dans le deuxième acte, et dont la voix d’une grande souplesse – qui lui permet de venir à bout avec aisance des difficultés de l’acte II – exprime aussi bien la violence, voire l’agressivité, que la douceur et la vulnérabilité composant la personnalité complexe du personnage. Le Klingsor d’Alejandro Marco-Buhrmester, à la prestation d’autant plus saisissante que le jeu reste sobre, propose une belle interprétation sonore de ce personnage ambivalent du magicien maléfique, double inversé d’Amfortas, la prestance du chanteur rappelant qu’il est lui-même ancien chevalier du Graal. Les quelques répliques de Titurel sont assurées avec justesse et toute l’emphase requise par Kurt Gysen. Nous avons gardé pour la fin de cette énumération Nicolai Schukoff, chanteur rayonnant dont la juvénilité enthousiaste et l’apparence naïve qu’il sait se donner sont en parfaite adéquation avec le personnage de Parsifal – qu’il a interprété à plusieurs reprises depuis son remplacement de Placido Domingo en 2007 au Staatsoper de Munich. Il maîtrise à merveille la double dimension lyrique et dramatique qu’exige ce rôle. Doté d’une réelle présence d’acteur, il incarne physiquement la mobilité qui anime son personnage, après la contemplation immobile de la célébration du Graal, jusqu’à la rédemption finale qu’il affirme au cœur d’un monde désenchanté.

Portée par des interprètes de talent, cette production témoigne de la détermination de son directeur, Serge Dorny, à faire représenter à Lyon, malgré les dimensions restreintes de sa salle d’opéra, les œuvres de Wagner. Elle sera reprise par les deux coproducteurs que sont le Metropolitan Opera de New York et la Canadian Opera Company de Toronto.

Fabrice Malkani | 14 Mars 2012

inferno-magazine.com

UN PARSIFAL FEMINISTE ?

Décidément, les forces maléfiques sont plus inspirantes que les élans mystiques des gardiens du Temple. On pense à cela en savourant la production du Parsifal de Wagner à l’Opera de Lyon (du 9 au 25 mars dernier), en partenariat avec le Metropolitan Opera de New York et la Canadian Opera Company de Toronto.

La mise en scène de l’acte II, le moment où se joue le drame dans le château du magicien Klingsor, est une véritable réussite visuelle. Les chanteurs évoluent dans une mare de sang, au fond d’une gorge rocheuse quasi-vaginale hérissée de lances, et ce substrat liquide dramatise le moindre geste tout en créant des images saisissantes, lorsque les taches rouges envahissent le lit sur lequel Parsifal résiste à la séduisante Kundry. Il faut ajouter que les deux protagonistes de ce duel sont à la hauteur du défi scénique. Elena Zhidkova déborde d’énergie dramatique et domine parfaitement une partition impressionnante, face à un Nikolai Schukoff très convaincant dans le rôle du « chaste fol » perdant peu à peu sa naïveté.

On est davantage sceptique face aux choix scénographiques des actes I et III, parfaitement symétriques dans l’opéra de Wagner, et se déroulant dans le domaine des chevaliers du Graal. Comme la plupart des metteurs en scène récents de l’oeuvre wagnérienne, François Girard, assisté du dramaturge Serge Lamothe, a tenté une interprétation personnelle – on ne saurait le lui reprocher. La fracture initiale, la plaie d’Amfortas, la perte de la Sainte Lance, est assimilée à une ségrégation – visualisée par un plateau divisé en deux – entre des hommes vêtus de blanc, condamnés à la chasteté, et des femmes rejetées, dissimulées sous des voiles noirs, Kundry étant la seule à évoluer entre les deux mondes. La réconciliation n’interviendra qu’à la fin, lorsque Parsifal rapporte la Lance, permettant à nouveau le mélange des sexes. L’idée est intéressante, incontestablement. Mais elle présente le danger de l’herméneutisme, en ne s’éclairant que lentement, et en plongeant le spectateur dans les affres de la conjecture. Pourquoi donc le Graal est-il apporté par les femmes ? Faut-il y voir le rappel de la matrice originelle, ou celui de l’éternelle fonction nourricière de la féminité ?

A moins que l’on se contente d’une lecture bien-pensante, inspirée des tensions de notre temps : les chevaliers du Graal sont habillés comme des Mormons, quand les voiles noirs des femmes rappellent ceux de l’islam. Mais le plus gênant vient de la réticence du metteur en scène à toute idée de liturgie – une réticence qu’il partage avec la plupart de ceux qui affrontent aujourd’hui cette oeuvre. Certes, la cérémonie du Graal n’est pas une messe, puisque la transsubstantiation se trouve inversée, le corps et le sang christiques devenant nourriture physique pour les chevaliers. Il est évident également que la théologie wagnérienne est clairement syncrétique, mêlant bouddhisme et mythologie germanique au catholicisme romain. Il n’en reste pas moins que les références chrétiennes y sont évidentes, et méritent d’être assumées, de même que la somptueuse musique qui accompagne l’apparition du Graal invite à un traitement visuel plus ambitieux qu’une simple réunion de jeunes hommes en chemise, aux allures de pique-nique ! Le refus de toute solennité liturgique transforme finalement les gardiens du Graal en adeptes d’une secte New Age, aux gestes étranges et un peu ridicules.

Heureusement, ces choix parfois contestables n’enlèvent rien à la beauté de l’ensemble, servie par les décors de Michael Levine et les vidéos de Peter Flaherty qui transforment le plateau en lande dénudée balayée par les nuages, et sur laquelle le déplacement des chanteurs respecte le délicat tempo wagnérien. C’est là que peut s’épanouir la magnifique basse de Georg Zeppenfeld, qui apporte toute la solidité que l’on attend pour le rôle ingrat mais essentiel du vieux chevalier Gurnemanz ; c’est là aussi que Gerd Grochowski peut exprimer toute la souffrance du roi malade Amfortas, avec une intensité qui fait pardonner quelques approximations. Le tout sous la baguette de Kazuschi Ono qui donne à l’orchestre de l’Opera de Lyon une couleur chambriste qui sied finalement assez bien à l’ultime oeuvre du maître, débarrassée des coups d’éclats de la Tétralogie, la seule à avoir été écrite en pensant à l’acoustique du nouveau théâtre de Bayreuth. A Lyon, on en oublie un peu l’éclat des cuivres – et on aimerait baisser le volume de la « machine à tonnerre » du deuxième acte, qui les couvre trop – mais on vibre au son de la clarinette basse, et on se perd avec délice dans les insaisissables mélanges sonores de cor anglais, de bassons et de cordes. En outre, le chef de l’Opera de Lyon parvient à un parfait équilibre des masses vocales, tant dans les finals des actes I et III que lorsqu’il s’agit de guider les virevoltantes filles-fleurs, entre deux choeurs et six parties exigeantes de solistes.

Oubliant ses réticences et ses interrogations scéniques, le spectateur est alors emporté pendant quelques heures dans un temps différent, ce temps qui « devient espace » comme l’explique Gurnemanz à Parsifal, et qui l’emmène vers des contrées à la fois inconnues et familières.

Le Directeur de l’Opera de Lyon a bien eu raison de proposer ce « festival scénique sacré » comme l’appelait son auteur, trente-cinq ans après sa dernière représentation dans cette ville. Cette réussite confirme la place importante qu’occupe désormais la scène lyrique lyonnaise à l’échelle internationale, puisque cette production affrontera dans quelques mois la scène du Metropolitan Opera de New York. Les spectateurs anglo-saxons apprécieront sans aucun doute ce Parsifal libérateur des femmes, et bien éloigné du christianisme romain.

Paul Mogual | 6 avril 2012

Le Monde

Sanglant, ce “Parsifal” ? Certes, mais quelle chair !

François Girard, réalisateur du “Violon rouge” signe la mise en scène de l’opéra de Wagner.

“Que de sang, que de sang !”, eût sans doute proféré le maréchal de Mac-Mahon (auteur du célèbre “Que d’eau, que d’eau !” devant la crue de la Garonne en 1875), s’il avait pu voir la nouvelle production de Parsifal à l’Opéra de Lyon. Le dernier opéra (1882) de Richard Wagner n’y avait pas été remonté depuis trente-cinq ans – c’est peu dire que la mise en scène confiée au cinéaste et metteur en scène canadien François Girard était attendue. Le réalisateur du Violon rouge (1998) a déjà à son actif lyonnais un joli doublé avec Le Vol de Lindbergh et Les Sept Péchés capitaux de Kurt Weill et Bertolt Brecht en 2006.

Loin des Parsifal aux rituels abstraits, des grands-messes ésotériques, des transcendances symboliques, François Girard a assumé le premier degré du “festival scénique sacré” (Bühnenweihfestspiel) voulu par Wagner, au risque de tomber dans un bain d’hémoglobine. Déjà dans Le Violon rouge, c’est avec le sang de sa femme morte en couches que le vieux luthier vernissait l’instrument destiné à son fils. Mais il est vrai que la thématique irrigue la légende du Perceval germanique issu des légendes arthuriennes qu’est Parsifal. Les chevaliers du Graal ont perdu la lance sacrée du Christ. Seul un envoyé de Dieu, chaste et pur, peut reconquérir la lance.

Grands et beaux espaces bibliques (décors de Michael Levine), vols fous de sombres nuées (vidéo de Peter Flaherty), lumières hollywoodiennes à la Cecil B. DeMille (David Finn), le metteur en scène oeuvre par plans cinématographiques particulièrement efficaces dans le placement des masses chorales. Le deuxième acte de la Tentation de Parsifal, au fond d’un immense ravin vaginal hérissé de lances phalliques et noyé de sang, avec ses filles-fleurs aux longs cheveux, aux robes tachées de rouge, a certes un côté chromo Dracula. Mais il agit avec une force d’autant plus grande que le troisième acte arbore l’extrême dépouillement du repentir et de la rédemption.

Châtré

Une belle et jeune distribution est à l’oeuvre sur le plateau, dominée par le Gurnemanz de Georg Zeppenfeld. Le Parsifal de Nikolai Schukoff possède la vaillance salvatrice de qui apprend la douleur des autres au point d’en faire sa vocation ; le Klingsor d’Alejandro Marco-Buhrmester, la violence de celui qui a payé le prix fort pour rester chaste (il s’est châtré) ; l’Amfortas de Gerd Grochowski, le désespoir de qui ne peut ni vivre ni mourir.

Quant à la Kundry sainte et séductrice d’Elena Zhidkova, son physique de femme-enfant et les élans (un peu crispés en ce soir de première) d’un registre vocal sans faille ne sont pas de maigres atouts. Dans la fosse, la direction chambriste de Kazushi Ono manque un peu de chair ? Dame, il y en a tant sur la scène !

Marie-Aude Roux | 12.03.2012

ConcertoNet.com

Trente-cinq ans que Parsifal n’avait pas foulé la scène de l’Opéra de Lyon, absence scandée à peine par le deuxième acte donné en concert à l’Auditorium Maurice Ravel, sous la direction de Peter Eötvös – autant dire que l’événement était attendu.

Il aurait pu être fort tentant de céder au ritualisme à l’œuvre dans l’ultime opus de Wagner. Mais le cinéaste et metteur en scène François Girard évite heureusement la bure herméneutique qui recouvre parfois le festival scénique sacré. Poursuivant une collaboration avec le Metropolitan Opera initiée avec Le Nez de Chostakovitch, où elle sera présenté la saison suivante, la production se maintient le plus souvent dans un apparent consensualisme illustratif – idéal pour la grande scène new-yorkaise. Le sacrifice du Graal au premier acte est l’occasion d’un exercice vidéographique où se dévoile une sphère planétaire à la surface qui rappelle celle de la peau, dans une éventuelle analogie mystique entre la chair et le céleste qui reste en suspens. Le côté léché des décors de Michael Levine accentue sans doute le polissage sémiologique esthétisant, même si l’on peut se laisser séduire par la pureté des lumières réglées par David Finn. On reste un peu sur notre faim également au deuxième acte, où le miracle de la multiplication des lances offre le matériel à une chorégraphie qui a l’avantage de souligner la cohérence de l’univers maléfique de Klingsor, où le rouge colore de sang l’eau dans laquelle pataugent les protagonistes. Le dispositif vidéo sert de macroscope à l’éclosion d’une rose rouge – le désir, la tentation – qui s’évanouit d’un coup lorsque Parsifal a la révélation du sens de la blessure d’Amfortas.

Un tel souci de littéralité n’empêche pas cependant la régie de prendre parfois le contre-pied d’usages établis – ainsi du Prélude aveuglé par quatre projecteurs placés en direction de la salle, qui se reflète sur le rideau de vinyle noir, et laissent progressivement place à la pénombre. On ne peut cependant manquer d’être parfois gêné par un travail qui suggère des pistes d’interprétation, mais s’abstient de s’y engager trop avant. Ce n’est pas que les images proposées manquent d’intérêt. La faille qui sécante les deux parties du plateau et où s’écoule une eau contaminée d’hémoglobine est fort probablement le symbole d’une société divisée, où femmes et hommes restent séparés à cause de la contrainte du désir sexuel. Il faut en réalité attendre l’Enchantement du Vendredi Saint pour voir le point de convergence de l’ensemble du spectacle: Kundry s’effondre bras en croix tandis que Parsifal guérit Amfortas, dans une répétition du sacrifice christique qui relie Kundry aux grandes figures de rédemptrices wagnériennes, tout en renouvelant la compréhension d’un événement-clef des Evangiles. Dans cette condensation se dévoile certainement la profondeur de la lecture de François Girard, qui a le mérite de juguler avec art son apocalypse herméneutique.

Même si elle n’est pas d’une originalité tapageuse, elle ne saurait expliquer la somnolence qui gagne parfois la soirée. C’est qu’il n’est point de grand Parsifal sans un orchestre d’exception. Et celui de l’Opéra national de Lyon ne semble pas dans sa meilleure forme. S’il a le mérite d’éviter toute grandiloquence, de concert avec ce qui se passe sur le plateau, Kazushi Ono peine à animer de manière continue le flux musical. Les cuivres dans le prélude sont déposés comme des aplats, sans lien avec ce qui précède, empêchant le mystère d’envelopper l’auditeur. Les moments de grâce – souvent en fin d’acte, et en particulier les dernières minutes de l’Enchantement du Vendredi Saint – ne peuvent racheter complètement les – très – longs tunnels qui précèdent. A cela il faut ajouter des chœurs plutôt prosaïques.

Heureusement la distribution vocale compense largement ces réserves. Vainqueur légitime de la soirée à l’applaudimètre, Georg Zeppenfeld délivre Gurnemanz des oripeaux patriarcaux que revêt généralement le personnage. La voix sonne avec une franchise et une vigueur remarquables, soutenues par une ligne impeccable. Une grande incarnation assurément. Amfortas bénéficie avec Gerd Grochowski d’un interprète fort honnête, mais plus vulnérable aux fluctuations de tension de la partition et de la direction orchestrale. Kurt Gysen fait preuve d’une cavernosité respectable en Titurel, tandis que Nikolai Schukoff rayonne d’insouciance juvénile en Parsifal. Dans ce registre du «chaste fol» tout en clarté, on préférera cependant la pâte d’un Klaus Florian Vogt. Emission haut placée et percutante, Alejandro Marco-Buhrmester manque toutefois de la noirceur tourmentée qui fait les grands Klingsor. D’une appréciable homogénéité, et d’une sobriété dans l’effet tout aussi remarquable, Elena Zhidkova retient valablement l’attention, même s’il manque un peu de sauvagerie pour faire une Kundry d’exception. Les deux premiers chevaliers manifestent une belle présence déclamatoire, tandis que les filles-fleurs se chargent de la volupté qui leur échoit.

A défaut d’être anthologique, le Parsifal lyonnais concentre quelques images fortes qui ne demandent qu’à féconder plus harmonieusement l’ensemble du spectacle. On a peut-être déjà une idée de ce dont on aurait besoin…

Gilles Charlassier | Lyon Opéra 23 mars 2012

nmz.de

Aus der Mitte entspringt ein blutiger Bach

Die Gralsritter sind bekanntermaßen unangenehm männerbündisch organisiert. Außer der bösen Verführerin & Urteufelin Kundry und den rasch verwelkenden Blumenmädchen beherrschen nur extrem erschöpfte Herren die Opernhandlung. Bevor sie von Parsifal erlöst werden, sinkt Kundry ohnmächtig – (wie) tot – zusammen. In François Girards Inszenierung fällt sie vielleicht nur in einen langen Schlaf, was sowieso eher unwichtig ist, da am Ende wahrlich kein Frauenmangel herrscht. Männlein und Weiblein tummeln sich und vermutlich gibt es bald Nachwuchs.

Girard erzählt in klaren Bildern das Drama der Ausgrenzung von Sexualität, ganz zu Beginn feiert die Gralsgemeinschaft ihre Zeremonien, während verhüllte Frauen abseits stehen. Im Verlauf der drei Aufzüge verdüstert sich die Szenerie, der Boden wird rissig, alles verdörrt, dazu ziehen Himmelskörper als gigantische, erfreulich ruckelfreie Videos vorüber, später gibt es eine Mond- bzw. Sonnenfinsternis und erst bei der Rückkehr Parsifals scheint sehr freundliches Licht durch die Wolken. In der Bühnenmitte verläuft ein Bach, der je nach Stimmungslage klar oder blutig sprudelt. Klingsors Zauberwelt ist eine rötlich schimmernde Grotte, in der die Blumenmädchen rauchende Speere schwingen und auf Opfer warten, Carolyn Choa hat das schön aus choreographiert.

Girard und sein Team (Bühne Michael Levine, Kostüme Thibault Vancraenenbroeck, Video Peter Flaherty, Licht David Finn) zeigen eine archaische Gegenwart mit Kleidern und Leuten von heute – alles in einer seltsamen Wüsten- und Kraterlandschaft. Häufig wird mit ko(s)mischem Nebel gearbeitet, der den Raum einhüllt, wie es im echten Leben wohl nur Helmut Schmidt vermag… Konzeptionell geht die Sache auf, Schwächen bei der Personenführung, vor allem im ersten Aufzug, muss man leider in Kauf nehmen.

Am Pult des Lyoner Opernorchesters sorgt Kazushi Ono für feine, elegante, zeitweise auch recht kräftige Klänge. Wunderbar, wie etwa die Verwandlungsmusiken bei Ono dynamisiert werden. Ein Manko sind jedoch die von Alan Woodbridge nicht sehr präzise einstudierten Chöre. Mit Georg Zeppenfeld erlebt man einen sehr jugendlichen Gurnemanz, dem es an stimmlicher Substanz dennoch keineswegs mangelt, Gerd Grochowskis Schmerzenstöne für Amfortas überzeugen ebenso wie die knisternd erotischen Kundry-Kantilenen von Elena Zhidkova.

Alexander Marco-Buhrmester (der im Programmheft rätselhafterweise Alejandro heißt) singt einen soliden Klingsor, ebenfalls ordentlich Kurt Gysen als Titurel. Mit Nikolai Schukoff in der Titelpartie wird man bis zur Mitte des dritten Aufzugs sehr glücklich, eine schlank geführte, unangestrengte Stimme. Zuletzt stellen sich leider Konditionsprobleme ein.

Jörn Florian Fuchs | 19.03.2012

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Media Type/Label
Technical Specifications
320 kbit/s CBR, 44.1 kHz, 546 MByte (MP3)
Remarks
In-house recording
A production by François Girard (2012)