Tristan und Isolde
Axel Kober | ||||||
Choeurs de l’Opéra National du Rhin Orchestre Philharmonique de Strasbourg | ||||||
Date/Location
Recording Type
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Tristan | Ian Storey |
Isolde | Melanie Diener |
Brangäne | Michelle Breedt |
Kurwenal | Raimund Nolte |
König Marke | Attila Jun |
Melot | Gijs van der Linden |
Ein junger Seemann | Sunggoo Lee |
Ein Hirt | Sunggoo Lee |
Steuermann | Fabien Gaschy |
Is there such a thing as a “somewhat satisfying” Tristan und Isolde? So it seemed on April 2 at the fifth and last Strasbourg show of director-designer Antony McDonald’s new production of Wagner’s opera at Opéra du Rhin. McDonald’s direction and aesthetic at first seemed overly blasé and static. Act I’s ship interior, with a higher bridge visible, could have been a workaday commercial river ferry; save for a fur coat produced by Brangäne for her mistress just before Marke’s boarding, there was no trace of aristocratic stature, let alone royalty, in McDonald’s 1960s-era costuming. Yet the stage pictures assumed cumulative power, thanks largely to a photographic wavescape background. First seen as Marke entered, it re-appeared for the central part of the Liebesnacht — in what otherwise looked like a high-end chain motel’s anonymous bridal suite — and as the constant visual anchor, through the windows, of the gray, wood-planked building in which Tristan lay tended by Kurwenal. Having the sea (and the Shepherd, well-voiced by Sunggoo Lee, doubling as the Sailor) visible rather than implicit in Act III lent physical context to an act that directors and designers often leave abstrusely hard to read. Mimi Jordan Sherin’s deft lighting also usefully evoked the sea’s presence, surely part of this score’s tinta.
Axel Kober led an unpressured but cogent reading, with wind playing admirably clear throughout and the double basses superb in the Act III Prelude. The “hunting” banda for Act II played from the entrance halls behind the audience, a fine effect possible in a smaller theater. Melanie Diener took on Isolde in Toronto two years ago. In Strasbourg, this former Agathe and Elsa certainly showed considerable virtues — musicianship, intelligently delivered words and a still generally attractive and liquid tone. Plus, she moved well and looked lovely in wavy Rhonda Fleming-style tresses. However, harshness too often crept in to top forte notes, giving her move into Heldensopran terrain an air more of “little left to lose” than natural progression. The Narrative and Curse seemed rather perfunctory. Thereafter her reading gained in detail and thus effect, with a good though not epochal Liebestod (isolated from the others in front of the curtain) that Isolde seems to survive in McDonald’s concept for the scene.
Ian Storey (Tristan) commands very little body language; he does command the notes, if hardly much poetry or tonal allure. He stood and sang inexpressively until Act III, where he won points for sheer endurance and found some dynamics, if not much color. Storey seems to be among the increasing cohort of male singers who refuse to wear wigs or color their gray hair: he looked older than the powerfully sung and resolutely acted Marke of Attila Jun, whose only fault was occasionally sliding into pitches. Raimund Nolte’s sympathetic Kurwenal was also gray, but in Anderson Cooper mode — Tristan is meant to be the romantic juvenile, not Kurwenal. Nolte sang handily, finding more legato passages than do most.
It was somewhat odd to see Michelle Breedt as Brangäne; an artist most associated in America with her leading role in David Poutney’s well-traveled staging of The Passenger was again aboard ship in 1960s dress. A fine musician and subtle actress, Breedt delivered some beautiful passages, but in the opening scenes — and again in the Warning — too much vibrato clouded her tone. Gijs Van der Linden’s strong tenor aced Melot’s brief duties. spacer
DAVID SHENGOLD | JUNE 2015 — VOL. 79, NO. 12
Première de Tristan et Isolde à l’Opéra National du Rhin
Pour cette nouvelle production de l’œuvre-phare de Wagner, qui fait l’événement de la vie culturelle strasbourgeoise, l’Opéra National du Rhin, sous l’impulsion de son metteur en scène invité Antony McDonald, a pris le parti de rendre plus « accessible » un texte musical éminemment symboliste, voire philosophique. Il est apparu nécessaire pour cela de relativiser sa charge conceptuelle et de revenir à une représentation plus concrète, donc plus humaine, de la longue conversation intime vécue par les deux protagonistes. Ce parti pris de simplicité allait se retrouver dans les décors, moins abstraits que de coutume, ainsi que dans le choix d’une scénographie plus réduite où l’action, déjà très dépouillée dans le livret wagnérien, devait pouvoir se suffire à elle-même.
Axel Kober dirige l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg (OPS), ayant déjà fait ses armes au Festival de Bayreuth dans une version de Tannhaüser en 2014, tandis que les rôles-titres sont tenus par Ian Storey et Mélanie Diener, tous deux wagnériens expérimentés. Alors que retentissent les premières notes du Prélude, accompagnées en duo par les volutes malheureuses d’une sonnerie de portable, très concrète pour le coup, tout le monde se prépare avec envie et curiosité à ce long voyage musical de près de quatre heures.
Le décor du premier acte surprend par son apparence moderne. En lieu et et place du traditionnel voilier chargé de conduire Isolde vers la Cornouailles où elle doit être mariée au roi Marke, l’oncle de Tristan, nous nous retrouvons embarqués sur le pont d’un cargo métallique aux teintes gris-vertes, très avancé sur la scène. Deux étages superposés reliés par un escalier diagonal permettent de séparer clairement les deux clans en présence : celui des hommes en haut, représenté par Tristan et son fidèle Kurwenal, qui tient la barre du navire et donc le destin d’Isolde dans ses mains, et celui des femmes en bas, représenté par Isolde et sa suivante Brangäne, dont le rôle diplomatique va permettre le rapprochement des futurs amants. Même si la passerelle du cargo ainsi que l’escalier métallique encouragent la circularité du déplacement des personnages, le décor accuse une certaine lourdeur, peut-être due à l’absence de perspective sur la mer, le lointain. De fait les chanteurs semblent embarrassés dans leurs mouvements : Mélanie Diener, pourtant très en voix dès ce premier acte, et qui campe une Isolde étonnamment masculine avec son long manteau de marin, paraît un peu rigide. Quant à Ian Storey, qui visiblement se réserve pour les quatre heures à venir, son Tristan manque encore de fraîcheur et de naturel. Il est d’ailleurs assez frappant de constater que les rôles dits « secondaires » de Brangäne et de Kurwenal, interprétés par Michelle Breedt et Raimund Nolte, ressortent de ce premier acte de manière plus convaincante.
Dans le duo amoureux du deuxième acte, qui est à vrai dire l’un des plus longs et des plus exacerbés de l’art lyrique occidental, les deux protagonistes parviennent à nous faire pleinement savourer la maturité de leurs voix respectives. Mais une fois de plus, le décor ne joue pas en leur faveur : le premier mur coulissant, prenant les trois quarts de l’espace scénique, enferme les chanteurs dans une avant-scène beaucoup trop réduite, tandis que la chambre à coucher qui se trouve derrière est tapissée de motifs assez tristes, mal adaptés à une scène de passion romantique. Quant à la lumière, bien que son utilisation par infimes variations d’intensité et de couleur soit la plupart du temps intelligente, il lui arrive d’être assez mal ajustée voire carrément inappropriée : par exemple lorsque Tristan apparaît en costume vert de garde-chasse dans la chambre à coucher éclairée de lumière verte également.
Le troisième acte en revanche est de toute beauté. Les cordes de l’OPS commencent par assombrir le climat avec des ronflements de basses puissamment dramatiques, suivis par l’élévation lente des violons dans l’aigu. Tristant est mourant, allongé sur son grabat de fortune, dans un lieu ouvert sur la mer qui pourrait être celui de son enfance. Puis un long solo de cor anglais, à la fois mystérieux et plaintif, se fait entendre depuis les coulisses. Au gré des à-coups de son dernier délire avant la mort, la voix de Ian Storey se fait de plus en plus tremblotante, de plus en plus fiévreuse. Le tableau est rendu d’autant plus touchant que la lumière devient crépusculaire, conférant ainsi aux dernières scènes une aura poétique bienvenue, que la Liebestod finale de Mélanie Diener sublimera encore davantage.
Au final l’impression que nous aura fait cette nouvelle production de Tristan et Isolde est plutôt mitigée : bien que brillamment servie par la vivacité de Axel Kober à la tête de l’OPS, et en dépit d’un troisième acte exceptionnel de la part des deux protagonistes, l’œuvre de Wagner pâtit d’une représentation dont l’originalité modernisante, s’opposant ouvertement à une lecture trop abstraite du livret, manque parfois cruellement de poésie.
Samuel Aznar | 22 März 2015
TRISTAN ET ISOLDE DÉMYTHIFIÉS À STRASBOURG
À l’Opéra du Rhin, Marc Clémeur poursuit un cycle Wagner jusqu’ici plutôt inégal avec un Tristan et Isolde bien plus équilibré et convaincant.
Est-ce la proximité et l’attractivité sur le public allemand qui n’a que le Rhin à franchir ? Est-ce la germanophonie de tradition en terre d’Alsace ? Quoi qu’il en soit, Wagner est toujours bienvenu à l’Opéra national du Rhin et y est accueilli par des salles pleines et enthousiastes. Après l’éclatante réussite de la Tétralogie mise en scène par David McVicar sous la direction de Nicholas Snowman, son successeur Marc Clémeur a continué en programmant chaque saison un opéra de Richard Wagner (Tannhaüser en 2013, Le Vaisseau Fantôme en 2014) avec, il faut bien le reconnaître, une moindre réussite. Pour la saison prochaine, il semble que soit envisagé le rarissime La Défense d’aimer. Mais pour cette année, c’est le monumental Tristan et Isolde qui est au menu.
Le metteur en scène Antony McDonald en présente une vision très concrète, presque réaliste, ni conceptuelle, ni psychanalytique, toute fraîche dans sa simplicité. Les décors et costumes inspirés par les années 40 et qu’il a lui-même conçus avec Ricardo Pardo figurent au I le pont et la timonerie d’un cargo où les mondes féminins et masculins sont clairement situés à des étages différents, au II une chambre d’hôtel au papier peint jaunâtre bien peu seyant (on se croirait chez Christoph Marthaler!). Au III Kareol, le château natal de Tristan, n’est qu’une maison de pêcheurs en bois au mobilier succinct, où son tricycle d’enfant a été oublié dans un coin. La mer est, comme il se doit, omniprésente en fond de scène. Antony McDonald trouve des attitudes parfaitement naturelles, des gestes pleins de vérité, qui humanisent les protagonistes, les rapprochent du public et, partant, rendent celui-ci plus sensible à leurs affects et à leur drame. Évidemment, si l’on y gagne en crédibilité théâtrale et en émotion, on y perd en hauteur de vue et en grandeur du mythe dans ce qui finit par s’apparenter à une banale histoire d’adultère dans un univers bourgeois.
Ian Storey a beaucoup chanté le rôle de Tristan et cela commence à s’entendre. Surtout en début de spectacle, la voix bouge énormément et il use voire abuse d’un mezza voce détimbré tout en claironnant quelque aigus. Par bonheur, les choses s’améliorent en cours de soirée ; il retrouve de la vaillance pour le duo d’amour et délivre au III une agonie de Tristan intensément vécue et très émouvante. Melanie Diener est une fort belle Isolde, au médium charnu et puissant, à l’autorité et à la présence scénique indéniables. Cependant l’extrême aigu lui reste délicat, qu’elle escamote ou raccourcit assez volontiers ; peut-être se ménageait-elle pour une Liebestod finale très engagée et aux aigus cette fois glorieux et tenus. Rien à redire en revanche au formidable Roi Marke de Attila Jun, somptueuse voix de basse au timbre profond et nourri, bouleversant de détresse et de colère contenue dans son monologue du second acte. Transformée par le costume et la mise en scène bien plus en servante ou nourrice qu’en double d’Isolde, Michelle Breedt réussit une Brangäne dramatiquement crédible et vocalement assurée, en dépit d’un aigu parfois tendu ; dommage qu’elle soit reléguée en coulisses pour ses appels qui, du coup, manquent d’ampleur et de mystère. Le Kurwenal de Raimund Nolte emporte moins l’adhésion : question de timbre trop clair, de largeur vocale un peu limite aux deux extrémités de la tessiture et d’incarnation trop monolithique. Gijs Van der Linden en Melot, tout comme Sunggoo Lee en berger ou marin, tiennent quant à eux parfaitement leur rang.
À la tête d’un irréprochable Orchestre philharmonique de Strasbourg, puissant et engagé, Axel Kober assure une direction précise, alerte et exceptionnellement attentive à chacun. Donnant tous les départs aux chanteurs qui ne le quittent pas des yeux, il se montre tout aussi appliqué et efficace dans les transparences presque chambristes des appels de Brangäne que dans la violence des climax orchestraux, où il a tout de même tendance à couvrir les chanteurs. Cantonné lui aussi dans les coulisses, le Chœur de l’Opéra national du Rhin ne peut hélas pas montrer toute sa vigueur et son intensité habituelles.
Michel Thomé | 23 mars 2015
Banalität mit Meerblick – Die Straßburger Neuproduktion von Wagners „Tristan und Isolde“
Die Neuproduktion von Wagners „Tristan und Isolde“, die die elsässische Opéra national du rhin jetzt in Straßburg herausbrachte, ist vor allem ein musikalisches Ereignis, das im Graben stattfindet. Dabei geht der aktuelle Bayreuther Holländer-Dirigent und Musikchef der Deutschen Oper am Rhein in Düsseldorf Axel Kober am Pult des Orchestre philharmonique de Strasbourg durchaus präzise und eigenwillig zu Werke. Und das nicht, weil er die ersten paar Takte des Vorspiels wiederholt, weil ihm ein Handy in Seniorenhand den Auftakt fröhlich vermasselte. Da bewies er Nervenstärke.
Nach geglücktem Start lässt er dann die Leidenschaften fluten, bleibt in den Tempi individuell, dynamisiert einerseits, lässt aber andererseits bei König Markes großem Monolog die Zeit fast stillstehen. Zum Glück hat Attila Jun den Atem und die Erfahrung, sich davon nicht lähmen und seine Stimme dennoch balsamisch fließen zu lassen. Mit ihrer Eloquenz und wohltimbrierten Gestaltung ihrer Rollen sind sowohl Michelle Breedt als Brangäne, als auch Raimund Nolte als Kurwenal die Stützen des hohen Paares.
Dass Ian Storey mittlerweile ein altgedienter Tristan ist, hört man ihm an. Dafür hat er die Fähigkeit, da zuzulegen, wo es nötig ist. Auf die Wahnfantasien des dritten Aufzuges kann er sich so zu konzentrieren, dass ihm tatsächlich eine beachtliche Steigerung in „seinem“ Akt gelingt.
Auch Melanie Diener punktet mit ihrer gleichbleibenden Kondition und puren Durchschlagskraft, wenn man sich an den metallischen Klang ihrer Stimme gewöhnt hat. Dann beginnt man die deutliche Artikulation zu schätzen, mit der sie bis zum Liebestod ihre Präsenz abrundet. Eindruck macht der Effekt, die Hörner der langsam abrückenden Jagdgesellschaft zu Beginn des Mittelaktes vom Rangfoyer aus zu hören.
Die Sänger haben nicht nur Axel Kober und das Orchester auf ihrer Seite. Sie profitieren über weite Strecken durchaus auch von der Bühnenarchitektur, die der Brite Antony McDonald neben der Regie und den Kostümen ebenfalls verantwortet. Bei der Kombination aus Rampenpostierung und Wand im Rücken haben die Töne kaum eine andere Chance, als über den Graben hinweg auch wirklich bei den Zuschauern anzukommen. Ob es nun die schweren Schiffswände im ersten, die Außenwand der Nobel-Absteige mit Terrassenfenstern im zweiten oder die des bretterbudenhaften Krankenlagers im dritten Aufzug sind.
Mit der szenischen Überzeugungskraft freilich ist es in dieser höchstens an die Achtziger Jahre erinnernden Inszenierung nicht allzu weit her. Das ist schon sehr konventionell gedacht; bei dem eher unmotiviert dekorierenden Auftritt von Choristen für einen Bühnen-Routinier sogar erstaunlich dilettantisch. Selbst wenn bei dem konkreten Hotelzimmer mit großgemusterter Tapete, Doppelbett und Meerblick im zweiten Akt erst die Außenwand zur Rampe hin und dann die andere zum Meer hin verschwindet, weitet sich das Ganze nicht zu einem imaginären Raum, mit einem echten „löse von der Welt mich los“ Zauber. Oder, wenn schon bald nach dem Isolde zu ihren „Mild und leise“ anhebt, hinter ihr eine schwarze Wand herabsinkt, was ihre wachsende Entrückung verdeutlich, wieder verschwindet und Isolde verdutzt einen vollkommen leergeräumten Raum vorfindet, bleibt der Schock des Banalen hinter den magischen Momenten, um die es vielleicht gehen sollte, doch nur eine Behauptung.
Bei dem Stellenwert, den die elsässische Rheinoper für die Kultur in der deutsch-französischen Grenzregion inzwischen hat, war die Ankündigung des umtriebigen Intendanten Marc Clémeur schon im September 2016 vorfristig aus seinem Vertrag auszusteigen eine Überraschung. Mit allen Risiken, die ein anstehender Intendantenwechsel mit sich bringen kann. Anders als bei dem bevorstehenden Wechsel von Nicola Joel zu Stephan Lissner an der Pariser Oper ist es am französischen Rheinufer nicht an der Zeit einen Kurswechsel herbeizuführen, sondern einen erfolgreichen beizubehalten.
Joachim Lange | 20.03.2015